Adeline est partie étudier en Espagne sans passer par le programme Erasmus. Elle vous explique les difficultés que l’on peut rencontrer lorsqu’on ne passe pas par ce programme européen.
Est-ce que tu peux nous expliquer ton parcours universitaire avant ta venue en Espagne ?
J’ai obtenu mon bac S en 2008 et je me suis lancée dans des études de psychologie à distance avec l’Université de Reims. J’ai obtenu ma licence en 2011 puis un an après j’ai intégré un Master en Psychologie Clinique, à distance également, avec l’IED de Paris 8, et que je poursuis encore aujourd’hui. Normalement, je termine mon M1 cette année (je l’ai fait en 2 ans).
Pourquoi as-tu décidé de partir étudier en Espagne ?
De nombreuses raisons m’ont poussée à partir. Une envie de connaitre autre chose, de découvrir une autre manière de vivre et de penser, et aussi d’apprendre une langue que je ne maitrisais que peu. Peut-être aussi une lassitude de l’état d’esprit en France, trop fermé à mon goût et assez égocentrique. Je cherchais désespérément un stage en France pour mon master depuis un moment, sans résultat. J’ai donc envoyé quelques CV en Espagne… Et en une semaine, je n’avais pas un, mais deux stages ! Etudiant à distance, j’avais la liberté d’aller n’importe où, j’en ai donc profité ! Et puis, cela me permettait d’aller vivre avec la personne que j’aime, alors, je n’allais pas refuser une telle opportunité !
Tu n’es pas passée par le système Erasmus pour étudier en Espagne, comment as-tu fait ?
Et non, au niveau master il est difficile d’obtenir un Erasmus, encore plus lorsqu’on étudie à distance. De plus, comme je comptais m’installer pour y vivre définitivement, un Erasmus n’était pas suffisant. J’ai donc décidé d’obtenir les équivalences de mes titres en Espagne, directement, sans passer par un organisme d’échange. Confiante, je pensais qu’avec le système de Bologne ce serait facile, mais… Ce fut loin d’être le cas. Les fameux « ECTS » ne m’ont pas beaucoup aidée. Première surprise : ici, le « grado » (licence) dure 4 ans, et non 3… Impossible de demander l’homologation directe de ma licence puisqu’elle ne correspondait à aucun titre ! J’ai donc fait une demande de reconnaissance de crédits avec la UNED, l’université nationale à distance en Espagne. Ils m’ont fait une proposition de reconnaissance de crédits équivalente à une L2. Grosse déception, mais pas le choix… Je suis donc actuellement en 3ème année de « Grado » de psychologie, que je devrais terminer l’année prochaine. Et dans tout ça, je ne sais pas trop quoi faire avec mon M1… Au mieux, je peux faire reconnaitre quelques crédits pour intégrer un autre master. Ça reste encore à voir…
Quelle est la principale difficulté de ne pas passer pas erasmus ?
Le manque d’information a été le plus difficile à gérer. On contacte un organisme qui nous dit oui, puis un autre qui dit non… Des infos non seulement manquantes mais en plus contradictoires… Une grosse désillusion puisque je me retrouve à rattraper des matières (même de première année) alors que je pensais avoir l’équivalence directe. Chaque université fait les choses « à sa sauce » et c’est vraiment difficile à gérer. De plus, avec les changements récents de loi, cela a bousculé tout mon projet professionnel, puisque les études requises pour être psychologue clinicienne ici sont totalement différentes. J’ai également eu des difficultés administratives, pour obtenir mon NIE, étant étudiante sans salaire, il a fallu prouver que je n’allais pas « être une charge » pour le pays. Finalement, apprendre la langue a été le plus simple, puisqu’en 3 mois je parlais déjà couramment espagnol !
Tu avais un peu peur de te lancer dans cette aventure avant de partir ? Comment te sens-tu aujourd’hui ?
Oui, j’avais vraiment l’impression de faire une folie, de partir à l’aventure sans vraiment savoir ce qui m’attendait… C’était un mélange de peur et d’excitation, une prise de risque. Néanmoins ce n’est pas « l’avant » qui est le plus angoissant, mais le « pendant ». C’est difficile de tenir le coup avec toutes les difficultés qui se présentent. Il faut beaucoup de persévérance ! Aujourd’hui je suis très contente de ma décision, je pense que c’est la meilleure chose que j’ai pu faire ! Cela fait un an et demi que je vis en Espagne et je ne rentrerais en France pour rien au monde, même si ici la crise dévaste le pays et que je dois refaire la moitié de mon parcours universitaire… J’ai trouvé une qualité de vie et une manière de penser qui correspondent à mon état d’esprit, et ça, ça n’a pas de prix !
C’est comment les études en Espagne ? Qu’est-ce qui te plait le plus ? Qu’est-ce qui te plait le moins ?
Alors, c’est vraiment différent. J’ai toujours étudié à distance, donc je peux faire la comparaison. La UNED, c’est l’université qui accueille le plus grand nombre d’étudiants en Espagne (180 000 environ au total). L’organisation est impressionnante ! Un campus virtuel, des centres associés partout en Espagne (j’ai donc une « mini fac » dans la petite ville où j’habite !) avec bibliothèques, heures de tutorat… C’est aussi là que l’on passe les examens. Mais aussi vidéoconférences, une utilisation impressionnante des TICs… Les nouveaux « MOOC » français existent ici depuis bien longtemps ! Le programme est beaucoup plus complet et chargé : pour chaque matière, un livre fait par les professeurs d’environ 600 pages à étudier en 3 mois. Pour les examens, ce sont en général des QCM, avec un contrôle continu dans certaine matière (TP, exercices pratiques, analyses d’articles…) La UNED est très bien vue sur le marché du travail car cela demande une grande organisation et beaucoup de courage vu l’ampleur de la tâche ! J’aime beaucoup l’entraide entre les étudiants, si spontanée, l’implication des professeurs et tuteurs, et puis, ici, personne ne se met la pression, chacun va à son rythme. Finalement, je rattrape aussi toutes les lacunes que présentait ma formation en psychologie. Ce qui me plait le moins ? Le mode d’évaluation. On nous demande d’apprendre presque par cœur, sans avoir à analyser ou réfléchir, c’est parfois frustrant. Le « grado » reste très théorique, malheureusement. Et bien sûr, le prix ! C’est beaucoup plus cher qu’en France : il faut compter environ 1000€ l’année en licence (pour les universités les moins chers) et le triple pour un master.
Quels sont tes projets pour le futur ?
Actuellement je donne des cours particuliers de FLE/FOS à des adultes et j’adore ! J’ai toujours été attirée par l’enseignement, et vu l’état actuel de la psychologie clinique, j’ai dû modifier mon projet professionnel et je pense me spécialiser en psychologie de l’éducation, et pourquoi pas, passer les concours pour être professeur de français en école de langues ou au lycée (accessible avec un master d’un an en plus de ma formation). Mais mon objectif pour l’instant est de me « graduer », si tout va bien l’année prochaine, et d’avoir enfin mon titre de psychologue ! Pour le reste, j’essaie de faire comme les espagnols : doucement mais sûrement, « sin prisa pero sin pausa » ! Et surtout, en profiter !
Quels conseils donnerais-tu aux jeunes souhaitant partir étudier en Espagne ?
Pour ceux qui souhaitent simplement vivre l’expérience de l’étranger et apprendre une autre langue, Erasmus reste la solution la plus simple. Une année d’assistanat en langue peut aussi être une super expérience (avec le CIEP). Pour ceux qui ont le projet de partir étudier/vivre à long terme… Commencez dès à présent à vous renseigner ! Le centre Eric Naric peut vous donner de précieux conseils sur les homologations de titre. Sinon il faut contacter directement les universités ou le ministère. Surtout, contacter plusieurs interlocuteurs différents ! N’oubliez pas que si vous souhaitez intégrer le système universitaire directement après le Bac, la « Selectividad » (examen d’entrée à l’université) est obligatoire, même pour les étrangers ! Se renseigner auprès des ambassades françaises pour les démarches administratives et pour connaitre le statut de votre (future) profession. Il faut penser à tout (sécurité sociale notamment)… Mais les espagnols sont très ouverts et accueillants, toujours prêts à aider, donc une fois sur place, on est quand même bien entouré ! Ah, et une dernière chose, n’oubliez pas que si vous étudiez en Espagne et que vous comptez rentrer un jour en France, le problème des équivalences se posera une nouvelle fois… Et que cela à un coût (il faut repayer 20% du prix normal pour obtenir la reconnaissance !)
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Publié par Bérénice
Co-fondatrice de "Jeunes à l'étranger". J'ai étudié 1 an au Japon, 1 an en Angleterre et j'ai fait un stage à Berlin dans le webmarketing.