Céline est une jeune française partie se lancée dans l’aventure du Service Volontaire Européen juste après son bac ! Elle nous explique en quoi consiste ce programme et ce que partir à l’étranger aprés son bac lui a apporté.
Est-ce que tu peux nous parler un peu de toi ?
Moi, c’est Céline. Petit bout de femme de 27 ans qui voyage depuis… Eh bien, je crois que je voyage depuis toujours ! Fille d’un couple franco-portugais, dès mes premiers mois de vie je vadrouillais entre la France et le Portugal. A 10 ans j’ai eu la chance de pouvoir rendre visite à mon oncle parti vivre au Vietnam. Sans même m’en rendre compte je venais d’attraper le virus du voyage. A 15 ans je pars en échange interculturel au Costa Rica et, à mon retour une seule idée m’obsède : passer mon bac pour repartir au plus vite !
Rêvant de changer le monde, à 17 ans je pars un mois au Burkina Faso puis à 18 ans je m’envole en SVE pour la Slovaquie. S’enchaînent ensuite les universités d’été en République Tchèque, un Erasmus d’un an au Portugal puis les stages au Nicaragua et au Chili. Après deux ans sous la pluie de Patagonie je m’embarque pour une aventure de 6 mois à Madagascar en contrat local et me voilà de retour en France pour reprendre des forces financières avant de repartir pour un tour d’Amérique Latine d’ici quelques mois.
Tu as choisi de partir faire un Service Volontaire Européen, peux-tu nous dire quelques mots sur ce programme ?
Le Service Volontaire Européen (SVE) est un programme européen qui permet aux jeunes de 17 à 30 ans de découvrir, voyager, rencontrer et surtout travailler en tant que volontaire dans une association entre 2 et 12 mois.
Que se soit dans la construction, l’éducation, l’insertion, le sport ou l’environnement, il existe des centaines de types de projets à faire en Europe, dans les pays partenaires et même dans le monde entier.
On peut trouver tous les renseignements nécessaires sur cette page : http://www.erasmusplus-jeunesse.fr/site/sve_jeunes-17-30-ans.html
Qu’est ce qui t’as donnée envie de partir après le bac ?
En 2006, l’année du bac, le gouvernement voulait faire passer les CPE, les élèves bloquaient le lycée, mes profs me poussaient à aller en prépa et moi je réalisais tout doucement que je n’étais pas prête à passer 3 ans assise sur les bancs d’un amphi impersonnel. Je n’avais aucune idée de ce que j’avais envie de faire, plus tard, « quand je serai grande » (10 ans après je n’ai pas beaucoup avancé sur ce point mais j’ai voyagé !) : le lundi je voulais être avocate, le mardi je me rêvais journaliste, le mercredi chirurgien, le jeudi je m’imaginais chargée de projet pour une grande ONG, le vendredi je me voyais plutôt psychologue et le week-end je profitais de mes amis, de la vie. Alors, pourquoi pas voyager plutôt que de faire plusieurs premières années à la fac, sans jamais vraiment trouver mon chemin ?
Par indiscrétion pure et dure j’ai écouté une conversation qui ne m’était pas destinée. C’est là que j’ai entendu parler du SVE. Comme quoi, le bouche à oreille-trop-curieuse a du bon parfois ! Était-ce le bon moment pour partir ? Saurais-je reprendre mes études après cette année de break ? Était-ce une erreur de tout quitter si jeune ? Je ne me suis posée aucune de ces questions. J’avais envie de voyages, de libertés, de rencontres et de découvertes alors j’ai foncé et je ne le regrette pour rien au monde.
Penses-tu que c’est le meilleur moment pour partir vivre une expérience à l’étranger ? Pourquoi ?
Je ne sais pas si c’est le « meilleur » moment pour partir mais il s’agit d’un très bon moment pour partir. Selon notre âge au moment du départ notre expérience sera différente, évidemment. Elle ne sera ni meilleure ni pire mais différente.
Dans de nombreux pays européens, les jeunes « bacheliers » (ou équivalent) prennent une année pour voyager, faire un service civique international ou militaire avant d’entrer à l’université. En France cette coupure n’est pas bien vu (combien d’adultes m’ont dit que si je n’intégrais pas une prépa j’allais gâcher mon avenir ?! Aujourd’hui j’ai un bac+5 et je m’en porte très bien, merci !) alors qu’il s’agit d’une véritable chance, une merveilleuse opportunité pour s’explorer, se découvrir, réfléchir à son avenir professionnel, à ses rêves, à tous ces petits riens qui nous font sentir vivant.
De nos 3 à 18 ans on est à l’école. C’est un peu comme si en maternelle on montait dans le train de l’éducation et qu’on se laissait porter de gare en gare. CP, nouvelle école, nouveaux copains… 6ème, choix de la LV1, veuillez changer de gare sans sortir du wagon… 4ème, choix d’une option, restez assis s’il vous plaît, de nouveaux voyageurs vont vous rejoindre… 1ère, les littéraires mettez-vous sur les rangées de gauche, les technologiques sur celles de droite… Terminale, terminus, veuillez changer de train pour les 2, 3, 5 ou 8 prochaines années…
Le problème avec ce train, c’est que si l’on ne sort jamais de la gare pour regarder la carte des opportunités qui s’offrent à nous alors on risque de se tromper de quai et de faire un voyage qui ne nous fera pas vibrer…
Partir un an à l’étranger nous permet justement de sortir de ce système pour se rendre compte qu’il existe des milliers de possibilités et que les études ne se résument pas à Science Po, HEC ou médecine ! Partir à l’étranger nous permet aussi de comprendre que ce n’est pas parce qu’on décide de ne pas faire de longues études qu’on est bon à rien : menuisier, cordiste, souffleur de verre ou charpentier sont des métiers tout aussi valorisant qu’avocat ou ingénieur mais cela, on oublie souvent de nous le dire…
Bien entendu ce n’est pas parce qu’on part à 18 ans qu’on aura une révélation (j’ai abandonné ma 1ère année de fac dès les premiers mois!) mais cela peut aider à choisir notre orientation. Ce « déclic » peut aussi se produire à 25 ans d’ailleurs. De nombreux volontaires sont rentrés chez eux avec des envies de changements, de nouveaux rêves et des projets plein la tête !
Quel est l’avantage de partir avec ce programme selon toi ?
La facilité ! J’ai commencé à aller voir l’association Peuples et Cultures à Montpellier en février. Je n’avais alors que 17 ans et le programme s’adressait alors aux 18-26 ans. J’ai donc du attendre jusque mai, date de mes 18 ans, pour m’engager officiellement dans le programme SVE. En juillet j’avais une réponse positive pour la Slovaquie et en septembre je m’envolais pour Bratislava.
Une fois sur place je découvre un appart meublé que je partagerai pendant un an avec une Danoise et un Allemand d’une vingtaine d’années chacun.
Le lendemain ma tutrice (chaque volontaire à un tuteur-référant sur place) venait me chercher pour me faire visiter la ville, me montrer mon association, m’accompagner dans les démarches « officielles » (ouverture d’un compte en banque, paperasse pour le permis de travail européen, achat d’un téléphone portable, etc.), me présenter à notre professeure de slovaque et tout simplement m’accueillir comme une reine en Slovaquie.
En plus de cela je touchais suffisamment d’argent de poche pour faire la fête toute la semaine et voyager tous les week-ends.
Oui, c’est vrai, certaines personnes mettent plus de temps que d’autres à trouver un projet qui leur convient (personnellement je n’ai pas été très exigeante : mon seul critère était : « je veux aller dans un pays de l’ancien bloc soviétique ») mais avouez quand même que c’est royal comme programme, non ?
Quelle était ta mission là-bas ?
Avertissement : bien que mon cas ne soit pas isolé, il ne s’agit pas non plus d’une fatalité donc, futur volontaire, rassure-toi, ta mission va très bien se passer !
D’après la base de données du SVE, je m’envolais pour travailler un an auprès de personnes en situation de handicap. Enfin, ça c’est ce qui était écrit sur internet ! En arrivant et en baragouinant quelques mots d’anglais j’ai rapidement compris que pour ma directrice « personne en situation de handicap » était synonyme de « enfant en situation de précarité sociale ». Je me retrouve donc à faire de l’animation dans un centre de loisir… A l’époque je n’appréciais pas vraiment le contact avec les enfants donc autant vous dire que cette mission surprise ne m’enchantait guère !
J’ai pris les choses en main et je me suis lancée dans une campagne de prévention sur la consommation de drogues et les rapports sexuels à risques. Une sacrée aventure dans un pays très conservateur, dans une ville où aucune association ne travaillait à l’époque sur ces problématiques et dans une langue que je ne comprenais que très peu !
J’ai aussi travaillé pour un festival international de théâtre pendant quelques mois suite à une rencontre improbable.
La directrice du centre de loisirs a rapidement compris que je m’épanouissais bien plus auprès de responsables culturels et d’étudiants qu’auprès de bambins joufflus. Elle m’a alors donné son feu vert pour ces deux projets. Comme quoi même si notre projet initial ne correspond pas à nos attentes on peut toujours trouver le moyen d’apprendre, de se rendre utile et de rendre cette expérience inoubliable. Il suffit juste d’oser !
Avais-tu un bon niveau d’anglais avant d’y aller ? Est-ce que tu as réussi à te débrouiller sur place ?
En arrivant en Slovaquie je savais à peine me présenter en anglais ! Nous étions trois volontaires-coloc. J’habitais avec un Allemand et une Danoise. Notre langue commune était donc l’anglais. De nature bavarde j’ai vite fait des progrès en les écoutant et parlant avec eux. Améliorer son anglais s’est fait tout seul. Au bout de quelques mois, sans même me rendre compte de mes progrès, je pouvais regarder la BBC et commenter l’actualité dans la langue de Shakespeare.
Sur place on avait aussi des cours de slovaque… En anglais ! Apprendre une langue étrangère par une langue tout aussi étrangère m’a été impossible. J’ai bien sûr appris quelques mots de slovaques mais pas au point de philophopher avec les locaux.
Par chance beaucoup de jeunes parlaient (ou baragouinaient) l’anglais. La langue n’a pas vraiment été une barrière pour rencontrer des gens et me lier d’amitié avec de nombreux Slovaques.
Dans la vie de tous les jours c’était parfois compliqué mais quand on veut, on arrive toujours à communiquer (par les gestes, les regards, les sourires, les gribouillages) et à se faire comprendre.
Comment ça se passe niveau finance ? Faut-il un peu d’argent de côté avant de partir ?
Pour l’argent, aucun soucis à se faire : tout est pris en charge ! Que se soit le transport, l’hébergement, la nourriture ou la sécurité sociale, le volontaire n’a rien à débourser. En plus il reçoit de l’argent de poche.
Les structures d’accueil décident elles-même de la manière dont le volontaire va bénéficier de ces avantages. Dans mon cas l’association nous louait un appartement et nous donnait du liquide tous les mois pour la nourriture et l’argent de poche.
Certaines associations peuvent vous proposer un logement chez l’habitant, dans un studio ou en chambre universitaire. Tout dépendra des possibilités existantes sur place. Pour la nourriture elle pourra décider de vous payer les repas à la cantine de l’école par exemple ou vous donner des tickets restaurants, encore une fois elle fera en fonction des moyens sur place.
Une fois dans votre nouvelle ville si vous vous apercevez que les conditions ne vous conviennent pas, n’hésitez pas à en parler à votre tuteur ou aux coordinateurs SVE de votre pays d’accueil. Avec un peu de diplomatie et quelques compromis vous arriverez sûrement à changer les choses pour que votre séjour se passe au mieux.
Au final, qu’as-tu pensé de la Slovaquie ?
J’ai aimé la Slovaquie. J’ai aimé en baver lors de randos dans les Tratas… l’hospitalité des gens… me faire arrêter dans la rue par un jeune homme, qui ne voulait pas me draguer, non, mais qui avait entendu mon accent étranger et avait envie de me présenter des gens, me faire visiter sa ville…
J’ai aimé ces lacs de montagne… le mélange architectural… la fête… m’asseoir en terrasse avec des inconnus pour partager une bière… les alcools interdits à la vente mais vendus à tous les coins de rue…
J’ai aimé les ruines… les forêts… ces petits vieux qui me parlaient du soviétisme… cette ancienne boulangerie soviétique transformée en boîte de nuit… les salons de thé… ce médecin qui, pour un épanchement de synovie au genou m’a conseillé de boire un verre de liqueur de plantes par jour…
J’ai aimé la Slovaquie pour tout ce qu’elle m’a apportée, aussi bien au niveau des rencontres, des paysages, des savoirs que des découvertes et des surprises.
Quelles sont les choses que tu as préféré durant cette expérience ?
La liberté ! Vivre en colocation, être ballottée entre toutes ces cultures nouvelles à découvrir, travailler pour le plaisir, avoir la possibilité de proposer et de créer des projets, rencontrer des gens nouveaux au quotidien, voyager…
Le partage ! Plusieurs fois dans l’année les volontaires étaient invités à un week-end de « séminaire ». C’était l’occasion pour nous de faire un point sur nos projets, nos ressentis et surtout rencontrer de nouvelles têtes. Une fois les présentations faites nous nous invitions les uns chez les autres le temps d’un weekend. Même si nos cultures nous séparaient, même si parfois la langue nous séparait, nous avions un point commun : celui d’être volontaire en Slovaquie. Ce point commun était suffisant pour tisser des amitiés, des amours parfois même.
La découverte ! Avant d’arriver en Slovaquie je ne savais rien de ce petit pays d’Europe Centrale. En un an sur place j’en ai appris bien plus sur sa géographie, sa politique, sa gastronomie et son histoire qu’en 15 ans de cours d’histoire-géo sur mon propre pays !
Les rencontres bien sûr ! Chaque sourire était prétexte à une nouvelle conversation, chaque conversation à un sourire. Lorsqu’on est dans un pays étranger, loin de tous ses repères, il me semble qu’on ose plus facilement aller vers l’autre. Peut-être que le sentiment de liberté et notre envie de découverte et de partage nous poussent à faire des rencontres bien sûr !
Quelles sont les choses que tu as le moins aimé ?
Lorsque j’ai compris que je ne travaillerais pas avec des personnes en situation de handicap mais avec des marmots, je n’ai pas fait la fière. Cependant, étant donné que j’ai pu mener à bien d’autres projets, cet imprévu initial s’est transformée en surprise positive. Donc, en ce qui concerne le SVE à proprement parlé, je n’ai rien à redire.
En ce qui concerne le « voyage », ce que j’ai le moins aimé c’est ne pas réussir à franchir la barrière de la langue. J’ai créé des liens, rencontré des gens, tissé des amitiés mais je pense que parler le slovaque m’aurais permis de comprendre que plus d’une fois mes amis se sont battus contre des skinhead car l’un d’eux était Hongrois et qu’en plus ils traînaient avec une Française à moitié hippie ; que le racisme et la xénophobie galopaient lentement mais sûrement parmi les couches défavorisées de la population ; que la sédentarisation imposée aux Roms par les Soviétiques avaient engendrée l’apparition de véritables ghettos par exemple. Parler slovaque m’aurais permis d’approfondir certaines thématiques et mieux comprendre ce nouveau « chez moi ».
Ton meilleur souvenir ?
Mon meilleur souvenir est multiple. Ce sont toutes ces rencontres qui ont fait de mon SVE une expérience inoubliable : cet étudiant croisé dans la rue qui m’a fait découvrir la vie en cité U ; cette jeune punk avec qui j’ai dansé dans le bar du campus ; ce volontaire français avec qui j’ai célébré le début du Carême dans un village de montagne où la tradition veut qu’on boive et mange jusqu’à plus soif en enterrant une contre-basse ; ces étudiants universitaires qui, pour le premier match de hockey sur glace de la saison, se sont déguisés et dévêtus ; ces volontaires du monde entier avec qui j’ai passé Noël et le jour de l’an dans les rues de Budapest ; ces inconnus qui venaient me saluer dans la rue car j’étais « la petite française » ; ces Français avec qui on buvait une dernière bière dans un casino décrépit lorsque les premières lueurs de l’aube nous assommaient de sommeil ; ces deux amis avec qui je sortais dans les bars pour jouer au scrabble des heures durant ; ce jeune adulte venu me parler de ses problèmes d’éjaculation lorsqu’il a entendu dire que je faisais de la prévention contre les rapports sexuels à risque ; ce Slovaque rencontré un soir de fête et grâce à qui j’ai écouté du rap slovaque, gagné un tournoi de pétanque et découvert le « ghetto » des Roms …
Des choses simples, des gens souriants qui m’ont fait prendre conscience qu’une partie de mon cœur resterait pour toujours à Nitra. Aujourd’hui j’ai oublié des noms et des visages. Hier certains sourires n’étaient que des rencontres éphémères alors que d’autres se sont transformés en amitiés qui perdurent malgré le temps et la distance.
Un conseil pour un jeune lycéen qui souhaite partir à l’étranger ?
Si tu as envie de partir, pars ! N’écoute pas ces personnes qui, confortablement assises sur dans leur canapé ou derrière leur écran, te disent que voyager t’assurera un échec scolaire. Au contraire, voyager te permettra peut-être de découvrir ta voie car aucun conseiller d’orientation ne saura mieux que toi ce qui te convient ! Si vraiment tu as envie de faire des études longues ce n’est pas un voyage qui t’empêchera de poursuivre ton rêve. Si tu n’es pas motivé par la fac, à quoi bon s’acharner à poursuivre des études qui te déplaisent ?!
Tu as 17-18 ans, tu vies dans un pays libre, tu as l’opportunité de voyager, tu as la chance de pouvoir bénéficier de programmes qui te permettent de découvrir le monde qui t’entoure alors pourquoi tu es encore en train de lire mon témoignage ! Contacte vite une asso d’envoi et pars ! La vie est belle alors profites-en !
Venez en savoir plus sur l’expérience de Céline sur son blog « Voyages d’une plume » : http://voyagesduneplume.com/2016/01/16/souvenirs-dun-volontariat-europeen/
Photos : © Céline
Publié par Bérénice
Co-fondatrice de "Jeunes à l'étranger". J'ai étudié 1 an au Japon, 1 an en Angleterre et j'ai fait un stage à Berlin dans le webmarketing.