Justine, professeur de FLE, est restée vivre en Grèce après son stage à Athènes. La jeune lilloise nous raconte comment elle est tombée amoureuse de ce pays et donne des conseils aux étudiants qui souhaitent s’installer en Grèce après leurs études.
Bonjour Justine, est-ce que tu peux te présenter rapidement ?
Bonjour. J’ai 25 ans, je viens du Nord de la France près de Lille et j’ai fait mes études universitaires à Arras. J’ai d’abord fait une licence LEA (licence en langues étrangères appliquées), j’ai étudié en Angleterre pendant un an, à Bristol avec le programme Erasmus et j’ai ensuite intégré un master FLE (Français langue étrangère) que j’ai entrecoupé d’une autre année en Angleterre avec le programme du British Council qui m’a permis de travailler en tant qu’assistante de langue française dans des high schools de la région de Birmingham.
Mon master s’est terminé avec un stage de 5 mois effectué en Grèce, à l’institut Français d’Athènes. J’ai, entre autres, donné des cours de FLE dans différents établissements scolaires allant de l’école primaire à l’université. J’ai aussi participé à des projets culturels comme la semaine de la Francophonie.
Maintenant, cela fait presque deux ans que je vis et travaille à Athènes. J’habite dans un quartier assez populaire à quelques stations de métro du centre-ville.
Tu as décidé de faire ton stage de FLE en Grèce, pourquoi as-tu choisi ce pays ?
Mon université a, comme beaucoup d’autres, des partenariats avec des établissements et des entreprises basés en France et à l’étranger. L’Institut Français d’Athènes est en partenariat avec mon université depuis quelques années et propose tous les ans à 3 ou 4 élèves de master FLE deuxième année de venir effectuer leur stage de fin d’année dans leurs locaux.
J’avais le choix entre différents pays mais la Grèce m’a attirée pour deux raisons : je ne connaissais pas le pays et l’intitulé du stage était en accord avec mon projet professionnel. J’ai proposé ma candidature et j’ai été retenue avec deux autres étudiantes.

Qu’est-ce qui t’as incité à rester vivre en Grèce ?
Je peux dire que je suis tombée amoureuse ici. Amoureuse du pays, de la ville d’Athènes mais aussi d’un homme. J’ai rencontré mon copain qui est grec et depuis nous vivons ensemble. Evidemment, d’autres paramètres m’ont incitée à rester. La manière de vivre des athéniens est en accord avec mes idées. J’aime prendre le temps de faire les choses et ici, on peut rester attablés dans un café pendant des heures sans voir le temps passer. J’apprécie aussi énormément la langue grecque. En tant que professeur de langues, j’ai vu là une occasion d’apprendre une nouvelle langue, rare par son nombre de locuteurs mais grande par son histoire.
Le paysage, le climat, les terres et les îles sont des raisons qui m’ont fait rester ici. La ville d’Athènes est unique : on y trouve les aspects positifs d’une capitale avec le tout-à-portée-de-main sans les aspects négatifs comme la surpopulation. Presque la moitié de la population grecque vit à Athènes mais la ville est très étendue. J’habite à trois stations de métro du centre-ville mais mon quartier ressemble à un village entouré d’arbres et d’écoles primaires. Les îles que j’ai visitées m’ont toutes surprise et émerveillée. Je ressens le besoin de rester et de les découvrir toutes même si cela semble difficile à accomplir en une vie. Evidemment, l’histoire de la Grèce, sa culture, ses innombrables musées à ciel ouvert et ruines antiques m’ont donné envie de rester aussi. Il y a tant de choses à découvrir ici qui me permettent de comprendre la construction de l’Europe et une partie de l’évolution de la langue française que j’ai envie d’y rester encore.

Tu as cherché un emploi en Grèce alors que la situation économique n’y était pas favorable. Comment était-ce pour les professeurs de FLE ? Tu as trouvé rapidement ?
Les professeurs de langue en général ont été assez épargnés par la crise. Il faut savoir que la Grèce est un des pays européens qui créent le plus de diplômés du supérieur. Les études sont très importantes. Dès l’école primaire, les grecs, qui finissent l’école tôt, continuent à apprendre. Ils vont tous les après-midi dans des frondistirio qui sont des centres de cours privés. Là, ils prennent des cours de soutien dans les matières qui leur posent problème, mais aussi et surtout, ils prennent des cours de langue. La première langue choisie est l’anglais. Les grecs sont pratiquement tous bilingues en arrivant au lycée. La deuxième langue choisie est souvent le français dans la région d’Athènes. Cela dit, l’allemand est une langue qui monte car l’Allemagne offre des possibilités d’emploi intéressantes. La profession a donc été épargnée pour ces raisons mais a aussi évolué « grâce » à la crise. Les grecs voient en l’apprentissage d’une langue étrangère la possibilité de partir travailler à l’étranger. Il n’a donc pas été difficile pour moi de trouver un emploi mais les salaires sont très bas. Je travaille dans un centre de langue mais je donne aussi des cours particuliers et c’est là que je gagne réellement ce qui me fait vivre.
Comment est le coût de la vie à Athènes ?
En arrivant en Grèce, j’ai trouvé que les prix dans les supermarchés, les boutiques de vêtements, etc. étaient presque identiques aux prix pratiqués en France. Ce qui change en revanche, c’est le prix des fruits et légumes. Ils sont beaucoup moins chers en Grèce car la production est beaucoup moins coûteuse. En plus, les tomates n’ont pas le même goût que celles que j’avais l’habitude de manger dans le Nord de la France…
Athènes est doté d’un système de transport urbain très pratique : train de banlieue, métro, bus, tramway. Tout y est. Le prix d’une carte de transport par mois est de 30 € pour un tarif normal et de 15 € pour les étudiants. Le prix est très vite rentabilisé si on voyage chaque jour pour aller au travail ou à l’université. Le prix unitaire d’un ticket de transport est de 1,20 € (tarif normal) ou 70 centimes (tarif réduit).
Avec la crise, les loyers ont baissé légèrement. On peut se loger en centre-ville assez facilement avec un loyer qui oscille entre 200 et 450 €. En général les charges sont comprises. Dans mon premier appartement, on payait 400 € à deux avec ma colocataire, charges comprises. Je me souviens avoir été surprise par l’appartement : très bien équipé, bien entretenu, bien situé. Je ne connais pas les prix pratiqués dans toute la ville mais certains quartiers sont beaucoup plus chers que d’autres évidemment, comme dans toutes les capitales ou grandes villes. Je dirais que pour un étudiant qui travaille à côté de ses études, le loyer et la nourriture sont des dépenses raisonnables.

Est-ce qu’on peut vivre en Grèce sans parler la langue ?
Oui, c’est tout à fait possible. Comme je le disais précédemment, les grecs parlent tous très bien l’anglais et ont tous des notions de français pour les plus âgés (le français était la langue vivante obligatoire il y a encore quelques dizaines d’année). Le pays vit du tourisme et ne lésine pas sur les langues étrangères. Les panneaux de signalisation sont d’abord écrits en grec puis en transcription latine. Les menus des restos sont tous bilingues voire trilingues pour les quartiers touristiques.
Si on veut travailler à Athènes, parler le grec est évidemment un plus mais n’est pas toujours obligatoire. Je n’ai pas eu besoin de prouver mon niveau de grec par un test ou un diplôme pour travailler. Dans mon cas, cela peut se comprendre car les établissements de langue demandent aux professeurs de ne parler que dans la langue enseignée pendant les cours. Cela dépend du travail recherché je suppose.
Les grecs sont-ils accueillants ? Est-ce facile de se faire des amis là-bas ?
Les grecs sont accueillants et ouverts aux autres en général. Les Français sont très bien accueillis. Les jeunes autant que les personnes plus âgées sont souvent ravis de rencontrer des étrangers, de découvrir de nouvelles cultures ou simplement d’améliorer leur niveau de français en discutant autour d’un café. Les grecs sortent beaucoup dans les cafés. Ils sortent tard et peuvent discuter pendant des heures avec leurs amis autour d’un seul café jusqu’au petit matin. J’aime cette ambiance. Il est facile de faire des rencontres.
Comment les grecs perçoivent-ils les français ?
Les Grecs apprécient beaucoup la France et les Français. La venue de François Hollande l’an dernier à Athènes a été vécue comme une fête même en tant de crise. La France a (presque) toujours supporté la Grèce dans les conflits. Les relations franco-helléniques ont toujours été très bonnes. La France a notamment joué un rôle important dans l’Indépendance de la Grèce.
Alors, les grecs ont une bonne opinion des Français et le montrent dans leur manière de les accueillir.
Quelles sont les choses que tu préfères à Athènes ?
J’adore l’éclectisme de la ville. En deux stations de métro on passe d’un quartier très populaire à un quartier punk ou d’un quartier punk à un quartier résidentiel aisé. Le centre-ville n’est pas en reste. On se promène au pied de l’Acropole puis on débouche sur un quartier tout en hauteur fait de petites maisons bleues et blanches avec des chats partout. Il y a toujours un côté capitale qui se mêle à un côté village. La ville est remplie de cafés et de tavernes qui proposent des merveilles à manger et à boire.
J’aime l’ambiance de la ville, la manière de vivre en prenant son temps. Je m’y sens en sécurité. J’aime aussi le fait qu’en hiver je peux sortir avec une petite veste et ne pas avoir froid. J’aime les paysages incroyables qui mêlent ciel et terre. J’aime le fait de pouvoir me baigner dans des eaux chaudes en été et de faire du ski dans les montagnes en hiver.
J’apprécie beaucoup la cuisine grecque. Les tavernes et restaurants proposent des choses que j’aime beaucoup. Mes plats préférés sont les dolmadakia et la fameuse moussaka. Les dolmadakia sont des feuilles de vignes qu’on roule autour d’une préparation à base de riz et d’épices et qu’on sert avec une sauce au citron. Ce sont un peu les makis grecs.

J’aime aussi le côté street art d’Athènes. Les athéniens apprécient beaucoup l’art et il y a beaucoup de street artists qui y travaillent. Les rues sont remplies de tags et graffitis en tout genre. Certains sont très jolis et intéressants, d’autres moins. Cela joue énormément dans l’ambiance de la ville qui mêle antiquités et tags ultra modernes.

Qu’aimes-tu moins ?
Je reviens ici sur les graffitis. Il y a énormément de dégradations liées aux graffitis et aux tags. Certaines personnes désirent simplement écrire des choses sur les murs, sans aucun but artistique et dégradent souvent des monuments historiques. En ce moment, la grande bibliothèque d’Athènes est en train d’être repeinte à l’extérieur car elle était recouverte de tags. Beaucoup disent que c’est un fléau pour la ville car les tags recouvrent aussi bien les murs des quartiers résidentiels que les quartiers touristiques. C’est un côté qui me déplait car cela montre qu’une partie de la population ne respecte pas les monuments et bâtiments publics. D’un autre côté, cela révèle la colère des gens et des jeunes en général qui s’expriment de cette manière. La misère se trouve ainsi exposée sur les murs de la ville.
Quels conseils donnerais-tu aux jeunes qui souhaitent partir vivre en Grèce ?
Je conseillerais de se préparer un minimum avant de partir. Notamment d’apprendre quelques phrases en grec car cela permet de créer une bonne situation de communication avec les gens même si le reste se passe en anglais. Les grecs sont ravis d’entendre un peu de leur langue dans la bouche d’un étranger. Ça leur fait plaisir et ça crée une bonne ambiance.
Je conseillerais aussi aux jeunes qui désirent partir vivre en Grèce de se renseigner sur tous les aspects pratiques liés à la santé notamment en allant sur le site du consulat de France en Grèce http://www.ambafrance-gr.org/-Actualites-consulaires- et sur celui du Ministère de l’Intérieur http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/conseils-aux-voyageurs/conseils-par-pays/grece-12253/ qui donne des conseils de sécurité aux voyageurs. La Grèce étant un pays en crise, la petite délinquance augmente et les vols de sac à mains notamment sont moins rares qu’avant. Je crois qu’il faut faire attention comme dans chaque grande ville.
Evidemment, je conseille d’être certain d’avoir un job qui les attend en Grèce ou d’avoir des contacts sur place pour cela car, comme partout, on ne peut pas vivre sans travailler et la situation de crise ne permet pas de trouver un travail aussi rapidement que dans d’autres pays. Il faut au moins avoir de l’argent de côté.
Enfin, je conseille à tous de tenter l’aventure car la Grèce est un pays magnifique qui réserve beaucoup plus de choses que la plage, les îles et les antiquités.

Les photos appartiennent à Justine et ont été retouchées par ©Jeunes à l’étranger
Publié par Bérénice
Co-fondatrice de "Jeunes à l'étranger". J'ai étudié 1 an au Japon, 1 an en Angleterre et j'ai fait un stage à Berlin dans le webmarketing.